~~NOTOC~~ @DATE@ ---- ====== Taxes sur les voitures chinoises : comment Pékin prépare sa riposte ====== {{https://www.lesechos.fr/monde/chine/taxes-sur-les-voitures-chinoises-comment-pekin-prepare-sa-riposte-2100920|lesechos}} L'intense lobbying de la Chine et le débat au sein même des Etats membres de l'UE n'aura pas fait plier la Commission européenne, qui a donc décidé de relever ses droits de douane sur les véhicules électriques chinois. La décision étant prise, c'est désormais avec anxiété que les entreprises européennes regardent du côté de Pékin. Alors que le gouvernement chinois a déjà proféré des menaces plus ou moins explicites de représailles, le ministre chinois des Affaires étrangères a prévenu mercredi qu'il prendrait toutes les mesures nécessaires pour « défendre fermement » les intérêts des entreprises chinoises. La Chine a notamment réagi en menaçant d'imposer des droits de douane sur le cognac, ciblant de fait particulièrement la France (LVMH, Rémy Cointreau, Pernod Ricard, etc.), pays que la Chine soupçonne d'avoir été particulièrement actif dans l'initiative européenne. Lors de sa récente visite en France, Xi Jinping s'était engagé à ce que le cognac ne subisse pas de droits de douane additionnels provisoires avant la fin de l'enquête antidumping chinoise. « Mais la Chine peut à tout moment considérer qu'elle a suffisamment d'éléments pour boucler son enquête et passer à l'acte », s'inquiète une source française. Un large éventail d'outils Pékin est passé maître dans l'art de la coercition économique. « La Chine utilise depuis longtemps l'accès à son vaste marché comme levier dans les conflits économiques ou politiques. La coercition économique de Pékin est méthodique et s'appuie sur un large éventail d'outils soigneusement adaptés pour maximiser les dommages causés à l'adversaire tout en minimisant l'impact sur la Chine », rappelle Yanmei Xie, économiste chez Gavekal dans une note publiée en mars. Outre l'arme des droits de douane (par exemple sur le vin australien après une demande d'enquête des autorités de Canberra sur les origines du Covid), Pékin a montré par le passé qu'il pouvait décider de bloquer des importations (officiellement pour des raisons sanitaires ou de sécurité, comme pour le saumon norvégien après l'attribution du prix Nobel de la paix au militant des droits de l'homme Liu Xiaobo). Boycotts « spontanés » Ou bien imposer des restrictions sur certaines de ses exportations (des terres rares vers le Japon pour un différend maritime), refuser d'accorder des subventions à des entreprises étrangères présentes en Chine (les batteries électriques sud-coréennes), interdire le tourisme de groupes chinois dans certains pays (la Corée du Sud et le Japon en ont déjà fait les frais) ou encore mettre en place des boycotts « spontanés » de consommateurs à l'encontre de certaines marques. Les exemples ne manquent pas concernant cette dernière arme : les cosmétiques et les voitures coréennes ont été boycottées après la décision de Séoul d'installer le système de défense antimissile Thaad. En 2021, H & M (plus de 300 magasins en Chine) a subi un revers colossal, avec la mise en place d'un boycott et le retrait de ses produits des plateformes d'e-commerce chinoises à la suite de sa décision de ne pas utiliser de coton produit au Xinjiang. LIRE AUSSI : Cognac : la menace de taxes chinoises n'a pas disparu Le porc européen menacé Si la sélection des cibles est opportuniste, en fonction du pays adversaire et de la nature du différend, les exemples récents montrent que les produits de consommation sont plus vulnérables que les produits industriels et que les biens facilement substituables par le consommateur chinois courent un risque élevé, note Gavekal. Le cognac pourrait ne pas être le seul secteur à subir les foudres de Pékin. La Chine a un large éventail de mesures et de cibles. « Une cible bien plus conséquente est l'industrie du luxe, qui dépend fortement des ventes aux Chinois et qui est en pleine crise cette année, met en garde Yanmei Xie. La France et l'Italie, les principaux fournisseurs dans ce domaine, se trouvent également être des pays qui ont fait campagne pour la protection des véhicules électriques. » Des difficultés à venir pour Airbus ? Les produits agricoles pourraient également être ciblés. Ils l'ont déjà été par le passé (le soja américain par exemple) et ont l'avantage pour Pékin d'être, pour beaucoup, remplaçables ou substituables. Récemment, le quotidien nationaliste « Global Times » a rapporté l'éventualité d'une enquête antidumping chinoise sur « les importations de certains porcs en provenance de l'UE » ou encore de « certains produits laitiers ». LIRE AUSSI : Face au dumping chinois, l'Europe se protège moins que les Etats-Unis Les voitures sont aussi régulièrement dans la ligne de mire de Pékin lorsqu'il s'agit de sanctionner certains pays (Japon, Corée du Sud). Les marques allemandes sont très présentes en Chine (Volkswagen, Mercedes, Porsche y réalisent 30 % à 40 % de leur chiffre d'affaires) et redoutent déjà de faire les frais de la décision européenne. Comme par hasard, le « Global Times » - encore lui - a récemment rapporté une proposition visant à augmenter les taxes douanières sur les importations de voitures de grosses cylindrées, ce qui affecterait particulièrement les constructeurs allemands. Lors d'une précédente série de frictions commerciales, Pékin avait déjà menacé de s'en prendre aux voitures de luxe européennes. Enfin, Airbus pourrait aussi voir ses livraisons et nouvelles commandes gelées en Chine. Pékin a soumis son rival Boeing à ce traitement à la suite des restrictions commerciales américaines. « Mais maintenant que les compagnies aériennes chinoises ont repris leurs relations avec Boeing et commencé à commander le Comac C919 chinois, Airbus pourrait devoir se préparer à des difficultés », prévient l'analyste de Gavekal.